vendredi 1 février 2008

Apartheid, l'expo coup de poing

CCCB Expo APARTHEID
"Butcher Boys", Jane Alexander, 1985.

L'excellent Centre de Culture Contemporaine de Barcelone (CCCB) présente pendant quelques jours encore l'exposition "APARTHEID, The South African Mirror" (jusqu'au 03 février). J'ai eu la chance de pouvoir la visiter samedi dernier. Témoignages, objets patrimoniaux, montages vidéos, rappels de l'actualité, mais aussi oeuvres d'artistes Sud-africains (Nandipha Mntambo, Johanes Phokela, William Kentridge... voir photos sur le web du CCCB), cette exposition invite à plonger dans les racines idéologiques racistes qui ont innervé pendant trop longtemps le régime politique Afrikaner.

Mais ne croyez pas qu'il ne s'agit que d'histoire ! Comme le souligne très justement Josep Subiròs, le curator :

"Apartheid in South Africa can be seen, not only as an extreme manifestation of old, deeply-rooted Western racism, but also as a dramatic but clear precedent, metaphor and paradigm of some fundamentally inherent aspects of the current world order." (L'Apartheid en Afrique du Sud ne doit pas être seulement vue comme une manifestation extrême d'un vieux racisme ancré dans la culture occidentale, mais aussi comme un précédent dramatique et clair, une métaphore, un paradigme de composantes fondamentalement inhérentes à l'actuel ordre du monde.)

C'est la grande force de cette exposition, dont on ne sort pas indemne : faire réflechir sur notre présent à la lumière de l'histoire contemporaine. L'expression peut sembler plate, elle prend un sens aigu dans cette expo qui laisse le visiteur K.O. à la sortie. La sortie où défilent par exemple des images de sans-abris noirs errant dans des rues cabossées, invisibles aux yeux des passants blancs. Photos de Johannesburg ? du Cap ? Non : Marseille. Ou encore : placardées du sol au plafond, des listes égrenant le nom, l'âge et l'origine de victimes de discriminations raciale et de mauvais traitements. Beaucoup d'enfant, de femmes dans ces listes. Morts, disparus. Dans la zone de transit de l'aéroport de Roissy par exemple.

CCCB Expo APARTHEID

Pour cette expo, l'artiste Sud-africaine Jane Alexander a recréé, dans la cour intérieur du CCCB, une grande installation de barbelés et de grillages intitulée : "Security with traffic (influx control)", qui évoque la frontière de Mellila, ville Espagnole au Maghreb, porte d'entrée de l'Europe pour les candidats à l'immigration. Sans commentaire.

APARTHEID, comme les précédentes expositions montées par le CCCB (Techernobyl, Frontières, ...) montre à quel point le musée (ou le centre culturel) est essentiel pour nous interroger sur notre rapport au monde. Contrairement aux médias de flux, qui nous saturent, voire nous sidèrent, pour reprendre les idées de Paul Virilio, l'exposition nous offre dans le même espace temps toutes les distances nécessaires et toutes les palettes de la compréhension. Encore !

2 commentaires:

Unknown a dit…

Eonnante la photo du mouton (si j'ai bien vu...) derriere les grillages qui n'est pas sans rappeler une autre distanciation plus percutante que bien des discours : Maus d'Art Spiegelmann

Unknown a dit…

La Fontaine à son époque utilisait déjà des animaux pour dénoncer la bêtise et la méchanceté de ses contemporains...